Benjo : un Post à Gallen
Un jeu de mot capilotracté pour cacher l’anxiété de devoir écrire le portrait du Maître absolu de la plume Poker française. Du haut de ses 30 ans Benjo est notre aîné à tous. Arrivé à la découverte de Pokerland tel descendu du Mayflower dans une terre en friche, il a écrit l’Histoire et est maintenant une sorte d’Encyclopédie vivante du Poker, vieux général retranché dans les locaux ultra secrets de Winamax.
Une discussion fleuve où à un moment on a un peu lâché le fil de la bio pour fureter à droite, à gauche. Benjo s’est un soupçon confié, mais garde une grande pudeur et différencie bien le personnage public et la sphère privée. Sensibilité à fleur de peau, pudeur, franchise, enthousiasme et fidélité aux idées et aux hommes, voyage dans la tête d’un Pro du clavier et du micro…
De Lille à la Bourgogne à Lille
La famille paternelle de Benjo est d’origine espagnole et a fui la guerre civile dans les années 30 : « Ils ont quitté une guerre pour en trouver une autre ».
Son papa maintenant à la retraite est « Un enfant de la Poste » qui a fait toute sa carrière aux PTT.
Il parle avec tendresse de sa maman, qui vient d’une famille nombreuse, elle a eu 4 frères, a travaillé d’abord à la Préfecture de Lille, puis après une période de chômage comme factrice.
« Un métier difficile, fatiguant, elle a les mains abimée par toutes les manipulations de papier et a dû arrêter la distribution. Mais bon c’est privé ça … »
Le petit Benjo fait son apparition à Lille en 1983.
A ce moment la famille est déjà installée en Bourgogne où le papa a été muté. Jusqu’à ses 8 ans il grandira en Puisaye, rejoint par son petit frère Aurélien quand il a 4 ans, dont il se dit très proche.
Benjamin est un petit garçon calme, très calme. Il parle peu, lit beaucoup, ayant appris à déchiffrer tout seul en épluchant des Tintin. La famille est installée dans un petit village de 500 habitants, dans un corps de ferme attenant au bureau de Poste dont son père est receveur.
Fan de tennis, celui-ci appuie fortement le projet de construction d’un court et Benjo apprend à tenir une raquette sous la houlette de son papa, devenu éducateur sportif sur son temps libre.
Et l’école ?
Benjo est un bon élève. « Je suis dans une minuscule école primaire dans le village d’à côté de chez moi où il n’y a que deux classes : un CP/CE1/CE2 et un CM1/CM2. En gros à la rentrée tu te déplaces de deux mètres dans la salle quand tu passes dans la classe supérieure. C’est vraiment l’école de campagne, fils de fermiers, mais notre instituteur est un fondu d’informatique et introduit dans la classe ordis, jeux et c’est là que je chope le virus geek »
Mais il faut partir et arrivée à Lille il tanne ses parents pour avoir son propre ordinateur et ils cèdent. Pour le petit garçon mutique et un peu sauvage, les changements d’école dus aux déménagements sont difficiles à vivre :
« T’arrives en CE1 dans une école, dans une autre en CE2, les autres se connaissent depuis le CP, voire depuis la maternelle, t’es le nouveau, c’est un peu dur, j’étais assez solitaire, mais bon rien de grave, c’est classique comme situation. Et puis j’avais mon frère, c’est là aussi que j’ai rédigé mon premier journal, avec les exemplaires écrits à la main.
Au Collège je me suis plus affirmé, je dessinais beaucoup de petits personnages inspirés des Simpson et des BD sur les profs qui plaisaient beaucoup. Au Lycée j’ai continué. Pas ma meilleure période les années lycée. Au lieu d’aller dans un établissement public, j’ai voulu suivre des copains qui rentraient dans un bahut privé. Je me tapais le bus à 6h45 le matin pour traverser la campagne et puis finalement je ne me sentais pas à ma place dans ce milieu, avec des gamins totalement conditionnés par leur milieu social. J’ai regretté mon choix, qui devait être dicté par un sentiment d’insécurité adolescent. »
Benjo qui a toujours excellé dans les matières littéraires, décide de passer un Bac ES : « Les maths c’est du granit, la philo de la masturbation, alors que l’éco c’est ancré dans le quotidien, ça traite d’actualité, tu as une prise sur les évènements… bon ça c’était ma vision en Seconde… à 30 ans je n’ai hélas pas changé le monde »
Les années fac sur fond de Poker
Il se lance dans des études d’Eco-Gestion, afin d’obtenir une licence, sésame aux études de journalisme dont il rêve. Le campus de Lille est immense, mais Benjo s’y sent mieux qu’au lycée.
Il découvre à cette période le Poker d’une manière assez inattendue. Fan de la série Les Sopranos diffusée sur Canal Jimmy, il est fasciné par un épisode de la 2e saison, où une partie de Poker est organisée par Tony le héros mafieux de la série. Il ressent une vraie fascination pour le côté noir, les clichés qui y sont étalés : mafia, cigares et whisky.
« Le meilleur pote de Tony y laisse tout : ses économies, son magasin saisis par Tony lui-même. On y voit la plus ignoble des addictions, le côté le plus sombre du Poker et c’est curieusement ça qui m’attire. Ce sont des clichés, mais dire maintenant que le Poker est olus sain qu’avant est un nouveau cliché et faux en plus à mon avis. Avant pour jouer il fallait des connexions humaines, le tuyaux pour la partie privée clandestine et surtout les fonds. Maintenant il suffit d’un ordinateur et d’une connexion Internet pour devenir accro au jeu, sans même sortir de chez toi. La tentation est à portée de main, tu peux mettre ta vie en danger tellement facilement. Un peu comme si la Coke était en vente libre dans tous les tabacs. Il faut plus que jamais savoir se contrôler et être responsable : le danger est au coin de notre salon »
Il achète donc des cartes et des jetons et se met à chercher sur le net tout ce qui peut lui donner des informations sur le Poker :
« C’est mon côté geek. Quand un sujet m’interpelle je vais passer des semaines sur le net à me documenter. Jeux Vidéos, 2nde guerre mondiale, Poker, je creuse jusqu’à savoir le plus possible de choses sur le sujet.
On est en 2002 et il n’y a finalement pas grand-chose. Je découvre les grandes légendes du Poker, je ne savais même pas à l’époque qu’il y avait des joueurs pros, je découvre le site de Loïc Sabatte et surtout celui qui pour moi est à l’origine du Poker amateur en France : le site de Mathieu Laurent, le premier Club Poker, c’est d’ailleurs un pote de Laurent Dumont.
Ce mec racontait des parties entre potes avec tout le vocabulaire, les expressions, une iconographie. Les joueurs venaient essentiellement de Marseille et de Chambéry, dès 1999 il publiait des classements de championnats, faisait des CR de ses tournois à l’ACF, organisait des parties de folies en extérieur ou au bord de piscines… Je lisais ça et ça me faisait rêver.
Je l’ai rencontré plus tard et quand j’ai participé à une de ces parties mythiques, j’avais l’impression d’être passé de l’autre côté de mon écran. Il n’avait absolument pas conscience à l’époque d’être un pionnier. »
Benjo ouvre un premier compte sur PS, mais le referme très vite : lui il joue au Poker fermé et ne comprends rien au Poker à deux cartes. Il passe son été à potasser et à la rentrée 2003 il fait une arrivée triomphale à la cafète, cartes et jetons en main et commence sa campagne d’évangélisation : lui et son pote Fabien passeront l’année à jouer.
Mathieu Laurent a créé sur son site un annuaire des joueurs, où l’on s’inscrit en quelques clics. Deux joueurs à Lille : le beauf de Matthieu qui vient de déménager et un dénommé Christophe. Fin 2003 Benjo, Fabien et Christophe s’assoient ravis autour d’une table. Le virus est bien installé et en février 2004 il organise un tournoi chez lui en passant une annonce sur le CP. Bilan une quinzaine de personnes dans le salon des parents, dont 3 joueurs venus carrément de Paris, se tapant 200 bornes pour jouer… une époque de passionnés.
A l’été il est contacté par François, qui gère un Club amateur de Backgammon, où les joueurs commencent à s’intéresser au Poker. Un sit&go hebdomadaire s’organise, le club deviendra Poker à Lille et jusqu ‘à son départ de Lille fin 2007, Benjo loupera rarement une partie.
Accélération de l’espace-temps
Déjà plus d’une heure que je suis suspendue aux lèvres de Benjo et l’on est qu’en 2007. D’un peu tendu au départ, il prend les rênes, accélère le débit et me bombarde d’informations, tentant de résumer les points forts de sa jeune et pourtant déjà longue carrière.
« Il y a deux rencontres décisives dans mon aventure. La rencontre avec Laurent Dumont a été cruciale. C’était à ma première visite à l’ACF. On était parti de Lille dans une vieille caisse pourrie avec Fabien, sapés comme des papes, pour jouer un 10€ rebuy négocié avec l’ACF par le ClubPoker. Vraiment une autre époque : il y avait des tournois à 5€, on donnait les cartes nous-mêmes, il n’y avait des croupiers qu’en TF. Je me retrouve tout intimidé à une table où il y avait Laurent et les fameux potes du site de Mathieu Laurent. Pour la petite histoire il y avait Almira qui a terminé en HU.
Autre rencontre primordiale, un joueur qui débarque à mes parties à Lille. C’est un commercial de Boulogne sur mer, la trentaine, fêtard et bon esprit : Thomas Fougeron. On devient pote, on va régulièrement à l’ACF ensemble, une fois on loue même un car et on part à 40 à Paris. Thomas est le premier français à se qualifier online pour aller jouer le WPT à 15 000$ au Bellagio.
On se fait un repas-beuverie, pour fêter ça dans un restau marocain et entre deux verres il me dit : pars avec moi. Je vide les 600$ que j’ai sur PS, je n’ai que le billet à payer, on est logés et on se fait arroser toute la semaine. Là encore c’est un rêve éveillé : comme si tu regardais un film des dizaines de fois et que d’un seul coup tu pénètres dedans. C’est à la fois familier et incroyable : tu te retrouves au bar à côté de Scotty, tu vois passer à un mètre de toi Doyle Brunson avec sa canne, tu es au cœur de ta propre mythologie.
J’ai eu envie de partager ces instants magiques. Je n’avais bien sûr pas d’accréditation, je regardais Thomas jouer, je courrais à la chambre pour raconter vite fait sur le forum du CP tout ce que je voyais, je repartais au Casino … les gens ont adoré et ça a été l’impulsion de départ pour moi, l’étincelle qui m’a donné envie de continuer à écrire. J’ai cette dette éternelle envers Thomas. »
Thomas Fougeron est fier de son pote et confirme :
“ Plein de souvenirs avec Pokeralille où on s’est rencontré et notre premier voyage à L’as Vegas en 2004 pour un WPT. Satellite que j’avais gagné sur Pokerroom l’ancêtre de Ongame et Bwin. A mon avis c’est ce voyage qui lui a ouvert la vocation de journaliste poker. Content pour lui et très fier de son parcours !”
Un autre Thomas fait son apparition, rencontre là aussi qui marquera les débuts de carrière de Benjo : c’est Thomas Fogelström qui s’occupe du site suédois Poker Room.
« On est invités à Stockholm à la conférence de presse du site avec Thomas Fougeron, on visite les locaux, on participe à la fête et je fais un post pour le CP. On m’en commande de plus en plus et en 2005 je fais le coverage du WPT Paris. Côté études, je fais une année blanche pour préparer les concours des écoles de journalisme »
L’année 2006 : la charnière
Début 2006 c’est au tour de Bruno Fitoussi de lui mettre le pied à l’étrier : il est consultant pour l’émission Le Tournoi des As. Il de-rush des heures de tournages pour garder les mains intéressantes à diffuser. Arrive l’EPT de Deauville en couvreur bénévole pour le CP, puis grâce à son bon niveau d’anglais, Thomas le suédois lui décroche une page en VO dans Card Player Europe, où il est en charge du Poker hexagonal.
Arrive la période des concours, qui seront la grande désillusion de Benjo :
« J’arrive assez sûr de moi aux épreuves. Je réussis à l’écrit à m’aligner 50e sur 850 candidats, il restait 123 candidats à l’oral, de quoi être confiant : j’ai une vraie expérience professionnelle, j’ai fait des stages notamment 6 mois dans un journal sur le Sport, je suis attentivement les infos, je suis prêt.
Le jury n’a pas du tout été impressionné par ma prestation, bien au contraire. En parlant de mon expérience dans le Poker, ils m’ont pris pour un rigolo. Je n’avais pas assez révisé en plus. De 50e je me suis retrouvé 124e … Sans avoir les notes j’imagine que j’ai dû avoir un zéro … 50e à l’écrit, je faisais partie de l’élite, une revanche sur ce que j’avais vécu au lycée, une vraie formation, un vrai diplôme, mon rêve de toujours évanoui…
Fin des études pour moi, depuis j’ai toujours bossé sur le circuit, tout s’est enchaîné, le CP, Poker770 et puis bien sûr Winamax. D’autres rencontres essentielles, Mad Harper de PokerStars ma meilleure amie, Harper, Kinshu …
J’ai parfaitement conscience que ce que je fais ne veut rien dire, ne rime à rien… Tout le monde hors de notre microcosme trouve tout ça ridicule, vain …C’est sûrement pour ça qu’il y a un côté très famille dans notre Communauté : on est soudé car à l’extérieur personne ne peut comprendre notre passion …Cette espèce de gêne que tu rencontres quand tu expliques ce que tu fais, je l’ai pris de plein fouet en 2006, mais c’est quasiment toujours le cas quand tu parles Poker à des gens extérieurs. »
Au top 10
Ces études avortées semblent avoir laissées une trace indélébile chez Benjo. Est-ce pour lui réconfortant d’être une vraie personnalité dans ce milieu : Des Jetons et des Hommes le classait même dans le top 20 des personnalités les plus influentes.
« Tu sais en règle générale, les personnes vraiment influentes tu ne les connais jamais. Julien est encore novice dans ce microcosme : il y a des personnes qui n’ont rien à faire dans ce classement et d’autres qui manquent cruellement. Quand quelqu’un est craint un peu, il est influent, quand tu es aimé et respecté tu l’es encore plus, mais c’est plus rare.
Pour moi les plus influents sont invisibles et cette année ce qui a vraiment marqué le Poker si je dois faire un top 3, c’est d’abord le FISC qui change le paysage du Poker français : beaucoup arrêtent, d’autres sont dans la merde, certains fuient ailleurs …
Ensuite il y a Winamax et ce n’est pas du Corporate. Winamax forge vraiment le monde du Poker. La room s’est appuyé sur les communautés, avec le WiPT ou le King5 les joueurs random et c’est ce qui paye. PokerStars a une communication efficace mais plus classique, plus policée : on fait rêver les gens genre vous allez être riches comme Elky et beaux comme Liv. Nous on est plus comme Chirac qui allait au fond de bleds paumés pour serrer des mains
.Il y a ensuite l’Affaire Pasqualini, même si je n’ai pas eu de cas de conscience comme d’autres pour le condamner puisque je ne le connais pas et c’est une chance car il a l’air sympathique. Je suis tombé des nues, je n’ai pas la triche dans le sang et donc ça me dépasse complètement.
On a essayé d’offrir un point de vue mesuré. Bouya qui a soulevé le lièvre a des intentions plus floues et il s’est discrédité tout seul. Son histoire de croisade contre Bruel est juste ridicule avec son lot de calomnies. Bruel n’est pas un voleur juste un mec qui a une boite qui marche bien.
Ça me fait marrer du coup les gens qui te disent : je joue en Live je gagne, le Online je perds. Le jour où certains réussiront à dire : je perds parce que je suis nul !!! Etre un bon joueur c’est travailler très dur : c’est le choix d’effectuer un travail de Titan totalement chronophage. Il faut être obsessionnel pour gagner, revoir en permanence ton jeu, élaborer de nouvelles stratégies au fur et à mesure que le Poker évolue et il évolue vite.
Les théories du complot avec les légendes urbaines comme « les comptes noirs » sont risibles : remettez votre ego en place, on ne sélectionne pas untel ou untel pour le rendre perdant. En plus les différentes théories complotistes s’annulent : certains nous accusent de ne faire gagner que les Pros par copinage et d’autres que les fishs pour qu’ils restent, mettez-vous d’accord les gars !!!
Rappelons quand même que l’algorithme est pondu par des spécialistes, on ne peut y toucher, on intervient pas dedans, c’est une sorte de boîte noire fermée à clef. L’ARJEL le fait vérifier par des sociétés spécialisées mandatées et le résultat est là : on s’approche au plus près de l’aléatoire »
Fatigue et réseaux sociaux
Il y a 2 ans, Benjo est rentré prématurément de Vegas en plein milieu des WSOP, il éffleure cette période, brièvement, encore mal cicatrisé :
« J’étais surmené, dès le début je savais que je n’y arriverai pas. Les autres années rien ne me retenait sur Paris, là je n’aurai pas dû partir, avec cet immense sentiment de culpabilité. J’étais mal, finalement je suis rentré. Trop tard. C’est une vraie blessure, vivre avec ses erreurs c’est insupportable, je ne m’en sors pas … il faudrait changer de ville, de métier, jeter mon portable … »
Refermant la douloureuse parenthèse nous évoquons les réseaux sociaux et les conflits larvés ou ouverts qu’ils génèrent dans notre microcosme.
« Certains devraient tourner sept fois leur souris sur le tapis avant d’écrire. La communication sur Facebook est complexe et à mon avis globalement nocive. Tu dis du mal de quelqu’un et en 5 minutes 5000 personnes sont au courant c’est assez effrayant. Je suis partisan de la communication dans la sphère privée.
Pour l’affaire Dieudonné, volontaire ou pas, le résultat est là : il a monté les gens les uns contre les autres. Moi je suis un Bisounours et son discours ne contient ni Amour, ni Progrès, ni compassion, c’est juste du business.
Il n’y a plus aucun humour, ce n’est plus drôle, juste abject. Il sous-tend en plus un côté guerrier, macho, viril, il y a peu de place pour les femmes dans cette histoire.
Les débats sont stériles, personne ne s’écoute, moi je sais où va ma sensibilité : ce mec n’est pas un vrai Leader au sens noble du terme, ce n’est pas Martin Luther King, il ne veut pas le bien des autres, ce n’est pas non plus une victime comme il veut le faire croire.
Il est dans une fuite en avant de l’ego, centré sur lui-même, il devrait lâcher du lest et faire un Mea Culpa. La situation générale est propice aux divisions et ce mec fait tout pour les creuser en désignant du doigt un coupable. Le complot, les esclavagistes, les banquiers juifs, on l’a déjà eu cette soupe : c’est juste un tissu de mensonges. Réagir par un « Ta gueule tu dis de la merde » ne suffit pas il faut argumenter. Les gens ne s’aiment plus, la situation économique est difficile : quand tout le monde a le ventre plein, blanc, noir, juif ou musulman, on s’en fout, mais là c’est loin d’être le cas. »
Les diverses reconversions des joueurs dans le business le laissent admiratif, il se dit absolument pas entrepreneur. Il souhaite bonne chance notamment à Ranking Hero.
Il est très sceptique sur l’organisation des Etats Généraux du Poker :
« Ça ne servira pas à grand chose je pense, c’est un peu de l’enfoncage de portes ouvertes. Les organisateurs sont pas cons et essayent déjà de ne pas se marcher sur les pieds. Et puis, c’est un business avant tout, le client, c’est le joueur, il donne son avis avant tout en consommant ou pas le produit proposé. Le rake ne risque pas de baisser dans l’immédiat, vu que la plupart des entreprises perdent de l’argent. Il va surtout falloir apprendre à vivre avec ces conditions qui seront difficiles à modifier dans l’état actuel des choses.
Regarde la démission de Vilotte. Il a été injustement décrié. Il y avait une erreur d’appréciation sur son rôle : il n’était qu’observateur, il proposait des choses et c’est le législateur qui disposait. Il connaissait très bien le dossier, mais ses avis purement consultatifs sont restés sans effet … »
L’avenir…
Il est temps d’aborder la question de l’Avenir, avenir du Poker en général et de Benjo en particulier :
« Ceux qui crient au loup, les pessimistes, ils estiment que le poker va mal, où est-ce qu’ils le souhaitent ? C’est pas pareil. Il y a une stagnation bien sur sûr, l’Âge d’or est terminé. Mais les gens ont encore envie de jouer au poker.. Winamax va bien et les tournois lives à buyin modérés font le plein patout en Europe et aux USA.
On va continuer à organiser des Events Lives qu’on veut mémorables comme Dublin : même si tu bust ce que tu vis autour est inoubliable et tu repars avec le sourire. A Wina on fonctionne beaucoup à l’affectif, les membres du staff et du Team Pro sont accessibles et vont même spontanément vers les joueurs.
Il faut que le fun soit là et il faut le créer. Il faut que le Poker revienne à sa juste place : un loisir, un passe-temps convivial. Il n’y a même pas 1% de pros, et en plus le contexte ne leur est pas du tout favorable en ce moment.
Moi je n’ai pas de plan B en fait. Je fêterai mes 6 ans chez Winamax le 5 février. Je n’ai pas d’idées, pas de diplôme, pas d’imagination. Je vis au jour le jour, chaque journée passée sans blesser personne est déjà une bonne journée pour moi. »
Oui mais l’écriture alors Benjo, elle manque ta plume : un blog, un livre ?
« J’écris pour moi surtout. L’écriture c’est très frustrant : arriver à mettre en mots ce que tu as dans la tête, c’est très difficile. Et à un moment je n’avais plus la fibre, je devenais trop narcissique, ça devenait du déballage : et à partir du moment où je ne pouvais plus écrire la vérité, je n’avais pas envie de continuer en jouant un rôle. Je ne lis même plus de blogs … sauf les très mauvais pour rire, on se rassure comme on peut.
Je suis une sorte de pièce de musée, on me garde comme une vieille star fatiguée, heureusement que j’ai mes poulains Harper et Kinshu pour aller au charbon. »
Laissons donc la conclusion aux deux acolytes de Benjo.
Harper :
” Avec Benjo, on se voit quotidiennement depuis maintenant cinq ans, on a voyagé partout ensemble, de Londres à Barcelone, en passant par Berlin, San Remo, Monte-Carlo, Cannes et bien sûr Las Vegas. Forcément, ça crée des affinités ! Benjo a une personnalité complexe, il est difficile à cerner et peut parfois paraitre distant au premier abord, mais c’est une personne particulièrement sensible et attentionnée.
C’est lui qui m’a introduit au sein de Winamax et il m’a énormément fait progresser dans mon travail rédactionnel. Si le jeu ne l’intéresse plus autant qu’avant, il reste avant tout un passionné du travail bien fait, et c’est un plaisir de se lancer dans des projets d’envergure plus importants avec lui, comme par exemple la Gazette que nous avons réalisée en fin d’année. Notre complémentarité est audible tous les dimanches soirs sur la radio de Winamax, un autre projet qui nous tenait tous deux à cœur, pour je l’espère encore un bon moment !”
Kinshu :
” Benjo, c’est le mec grâce auquel je me suis dit “C’est possible de gagner sa vie en parlant de poker”. A l’époque, il me captivait sur les différents supports sur lesquels il officiait (EPT live, coverage Winamax, blog perso). C’était le seul en France à faire ça, et il le faisait bien. J’ai découvert cet univers début 2008 et forcément été amené à le rencontrer, puis à le côtoyer les mois et années qui suivirent.
Il a longtemps été un personnage énigmatique avec lequel je n’avais pas forcément d’affinités. Mais j’ai appris petit à petit à le connaitre et à l’apprécier. Et puis finalement, on s’est retrouvé à bosser ensemble. J’ai beaucoup appris depuis que je suis sous sa houlette et suis très heureux de travailler quotidiennement avec un mec aussi drôle et talentueux que sérieux et appliqué. Et surtout, c’est devenu un Ami avec lequel je partage plein de trucs et sur lequel je peux compter quand ça ne va pas fort. Et rien que pour ça, je ne regrette pas d’avoir choisi cette voie.”