Interview D’Anaïs Lerouge : Vers la Sérénité

Anaïs Lerouge tout le monde la connait à Pokerland. Terreur des events féminins, elle affiche quand même 3 victoires sur des EPT Ladies. Au-delà de ses talents au Poker elle est aussi connue pour avoir un caractère bien trempé, pas la langue dans sa poche et des amours tumultueux.

La belle nous a fait une fugue en Australie depuis la fin de l’année et semble avoir gagné une luminosité qui transparait sur ses photos : Anaïs aurait-elle trouvé la sérénité au pays des kangourous ? Retour sur son parcours et ses aspirations pour l’avenir.

Une enfance dorée pour une enfant rebelle

Anaïs est née le 25 août 1987 à Laval. « Vierge folle ou vierge sage, je te laisse deviner »

Elle profitera peu des charmes de la Mayenne : elle a des problèmes dermatologiques et les médecins conseillent à ses parents de vivre en bord de mer. Son papa est storiste, sa maman aide-soignante à domicile, leur fille est leur bien le plus précieux et ils décident donc après repérages de partir s’installer à Cannes.

Elle a 18 mois et grandira donc au soleil au sens propre comme au figuré.

« J’ai vraiment eu une enfance très cool. Mon père a eu deux enfants avant moi mais j’ai été élevée comme une fille unique. Plutôt gâtée, choyée, je n’ai vraiment jamais manqué de rien, un vrai cocon avec tout que pour moi. J’étais pas pourrie non plus, mais j’avais tout ce que je voulais et j’étais assez capricieuse. J’ai fait des pages et des pages de lignes et je me suis retrouvée plusieurs fois avec ma chambre vidée de ses jouets en tête à tête avec mon aquarium. J’aurais beaucoup aimé avoir des frères et soeurs, ça m’a beaucoup manqué.

Au niveau loisirs j’ai longtemps fait du judo jusqu’à la ceinture bleue, après il y avait les « katas » à passer et ça m’a soulé … En fait j’ai jamais eu de grandes passions : j’ai fait aussi du basket, de l’équitation, de la danse…

Et puis aussi du piano, au Conservatoire, j’avais même des horaires aménagés à l’école. Je joue toujours, je viens même de m’acheter un petit synthé. La musique c’est très important pour moi depuis toute petite. Mes parents n’étaient pas très joueurs, alors je lisais énormément, notamment un journal pour les gosses « Mon Quotidien » et je jouais du piano et écoutais de la musique en cachette sur mon radiocassette pour m’endormir. »

Une scolarité compliquée

Au niveau scolaire les choses se gâtent assez rapidement pour Anaïs qui a bien du mal à respecter l’autorité…

« J’ai toujours été bonne élève, mais j’avais de gros problèmes de discipline, je me suis faite virée de 5 écoles, la première fois en CM2. J’étais insolente, bavarde, distraite ; au départ j’étais adorée de mes profs et puis mes défauts se sont accentués avec les années.

J’ai jamais rien fait de très grave hein, mais j’ai juste ce don de rendre dingues les gens avec un sourire en coin ou un regard arrogant. J’étais vraiment rebelle, j’ai toujours détesté l’autorité, ça n’a pas changé mais je me suis quand même bien calmée depuis.

Avec les autres j’étais plutôt  leader, on m’aimait ou on me détestait, mais quand t’arrête pas de changer d’école les rapports ne sont pas simples.

Je voulais être chirurgien, c’était une vraie vocation, mais bon vu mes nombreuses absences, et mes résultats en baisse… J’ai fait une Seconde EGC, j’ai redoublé, je me faisais virer, je rechangeais d’école… C’était compliqué et j’ai fini par me retrouver en CAP Coiffure. J’ai décidé de le passer en candidat libre et je l’ai loupé à 6/10e. Ils ne m’ont pas rattrapée car ils n’aiment pas les candidatures libres. J’avais juste les Sciences à repasser et j’ai décidé de me mettre à bosser en attendant… »

Les Casinos et les Amours

Anaïs ne repassera jamais son épreuve de Sciences : elle commence à hanter les Casinos cannois et y fera des rencontres décisives.

« La passion du poker m’a probablement été transmise par mon oncle et ma cousine Alisson avec qui j’ai passé des heures à jouer au poker fermé. Je trainais au Casino avant mes 18 ans pour regarder, ça me fascinait (ils ne demandaient pas encore la carte d’identité à l’entrée).

J’ai toujours aimé jouer : cartes, jeux de société, jeux vidéo, jeux de pistes. Je me fais chier quand je joue pas. J’ai rencontré Thomas qui est devenu mon meilleur ami de l’époque et qui était lui-même croupier. Il m’a filé ses cours et j’ai appris toute seule chez moi. C’est à cette époque que j’ai rencontré un de ses meilleurs amis dont je suis tombée amoureuse. Je suis restée avec lui 2 ans.

Deux ans très difficiles : on lui a diagnostiqué un cancer du pancréas dès le début de notre relation. Les chimios, l’angoisse, mais j’étais folle de lui. Lui ne m’aimait pas vraiment. Il m’a quitté peu avant sa mort le 10 mars 2010. Je l’ai appris en allant à Vegas pour la première fois. L’avion allait décoller et j’ai reçu un coup de fil pour m’annoncer la nouvelle. L’avion a finalement atterri, c’était vraiment un sentiment étrange et paradoxal : les larmes et le bonheur à la fois.

 

Quelques temps avant, j’avais vu une annonce à l’ANPE : le Casino de Mandelieu cherchait des croupiers débutants, j’ai postulé, j’ai été prise et j’ai reçu une formation de quelques heures. Début aux tables sous la direction de Pierrick Torasso. Il m’a donné ma chance et j’ai continué avec lui dans l’évènementiel en freelance.

J’ai ensuite rencontré un joueur à Marrakech. J’étais paumée, il était adorable, il m’a mise sur un piédestal… J’étais attirée par le personnage et surtout perdue, en pleine confusion dans mes sentiments. Les mauvaises langues disaient que j’étais avec lui pour l’argent, c’était plus une relation de transition. Quand j’ai appris qu’il m’avait trompé j’ai confondu blessure d’ego et Amour. C’était une relation violente, qui si elle m’a beaucoup apportée, m’a aussi trop exposée aux regards des autres. J’ai beaucoup appris de cette erreur. Il y a eu la dispute de trop et j’ai mis un point final en Janvier 2011 »

Sans donner dans la psychologie à deux balles, les amours d’Anaïs semblent être toujours sous le signe du compliqué : un taulard, un malade, un violent puis plus tard un geek et un fêtard… J’évoque le sujet douloureux du divorce de ses parents.

« Mes parents ont divorcés en 2000 quand j’avais 13 ans. Ça a été un vrai traumatisme pour moi. Ils avaient décidés d’acheter une maison, on était dans un studio en attendant et ma mère a eu à ce moment-là envie de vivre sa vie. Elle s’est mise avec mon père à 17 ans, n’a pas assez profité de sa jeunesse, sa vie ne lui plaisait plus, mon père travaillait beaucoup et n’était pas souvent là, elle a fait son craquage à 35 ans.

Mon père c’est l’Homme parfait : prévenant, plein d’attentions, gentil, fidèle, bricoleur, touche à tout…

C’est la pire période de ma vie ces 4 années-là. J’ai beaucoup soutenu mon père et j’en voulais à ma mère, mais plus maintenant. Je suis très proche d’eux. Ma mère je suis tout pour elle, elle n’a que moi.

Maintenant elle est encore toute seule alors que mon père s’est remarié. Les 3 s’entendent super bien et ça c’est génial. Ils se téléphonent, sortent ensemble … Mon père c’est vraiment mon modèle masculin parfait et je sais que ça joue sur mes relations. J’ai du mal à concevoir qu’un mec ne soit pas comme lui. Moi-même si j’ai du caractère je suis comme ça dans une relation : fidèle, entière, franche. Quand j’aime, j’aime, et quand je suis déçue j’ai un mal de chien. Je ne  suis pas rancunière par contre, pas assez d’ailleurs, j’ai trop tendance à passer l’éponge. »

Anaïs m’égrène ensuite l’histoire de ses amours des années poker, entre insatisfaction et échecs, qui la mèneront à sa décision de s’exiler.

« Avec Laurent on était très, trop fusionnels. J’étais très amoureuse, mais nos caractères étaient incompatibles. Il ne m’apportait pas ce que je voulais, c’était plan-plan, on n’a pas fait grand-chose, blasée.

Quand on s’est quitté j’ai acheté un billet d’avion pour Vegas bourrée, et je suis parti pour l’oublier. Dès mon arrivée, j’ai rencontré Idris dans une soirée et on s’est retrouvés plus ou moins ensemble. Il ne voulait pas être en couple, on vivait nos vies la journée et le soir on finissait toujours ensemble. C’est fou que dès qu’un mec ne veut pas de moi je fonce tête baissée.

J’ai vécu un an avec lui et c’était je pense ma pire relation. Vivre avec quelqu’un qui ne t’aime pas pendant un an c’est horrible. Pourtant il était bien avec moi : je l’écoutais, je m’occupais de lui, de sa santé, de son linge, je cuisinais. La femme (quasi) parfaite je te jure !!! Il m’a quittée  puis s’est remis avec son ex quelques temps plus tard… Après 10 mois et à 17 000km, je commence à m’en remettre et à voir l’ego que j’ai mis dans tout ça. Mais je n’ai jamais été heureuse dans mes relations… »

La fuite en Australie : retour à la vraie vie

Cette fin de relation chaotique pousse Anaïs à concrétiser un vieux projet : partir ailleurs, loin, très loin.

« Pas de mec, pas d’enfant, pas de taff, une vie qui me plaisait de moins en moins, des années que j’avais envie de voyager, cette rupture m’a servi de déclencheur. Je vis du Poker depuis 5 ans, comme croupière d’abord, puis comme joueuse entre stacking et sponsoring. J’ai pas mal discuté avec David Jaoui mon meilleur ami dont je suis très proche.

J’allais mal, j’avais envie d’une vie plus saine, plus stable, plus « normale » En France je ne serai jamais arrivée à passer ce cap et quitte à faire un boulot alimentaire je ne me voyais pas le faire à Cannes. J’ai vendu tout ce que j’avais et je suis partie direction l’Australie le 25 décembre.


On m’a prêté un appart pour 15 jours, Clem et Paco m’ont rejoint, j’ai pris des cours d’anglais pour améliorer mon niveau. Je raconte tout ça sur mon blog. Je me suis baladée, j’ai fait des rencontres et là je suis dans une coloc sur la Gold Coast grâce à une copine de Cathy qui était sur place. Une grande maison, une belle chambre, je suis franchement au top. Mes parents me manquent beaucoup par contre et il y a des moments très difficiles. Mes amis aussi David, Cathy même si on est un peu en froid en ce moment, Ilan, Céline, Paul aussi…

En fait je mène la vie d’étudiante que je n’ai pas pu vivre avant : je sors beaucoup, je fais la fête, mais en toute simplicité sans le côté VIP.
»

Mon impression visuelle se confirme donc : on sent Anaïs en plein retour sur elle-même, en mutation presque…

« Oui je pense que j’ai changé, ou en tous cas c’est en cours… Je suis heureuse d’avoir pris cette décision et de vivre tout ça. C’est quand même courageux d’avoir fait ça non ? Je réapprends la simplicité des choses, je fais de nouvelles rencontres, je me reconstruis. Les pires galères vont devenir mes meilleurs souvenirs : une nuit dans une auberge de jeunesse pourrie avec cafards et ronfleurs, tu passes une nuit atroce et le lendemain tu te dis : je l’ai fait !!!

Tout le monde me dit que j’ai changé sur les photos. Je suis pourtant toujours moi mais je me sens bien.

Il me manque juste un boulot, c’est pas facile pour moi j’ai jamais fait ça !!!
A court terme, l’urgence c’est trouver un taf avec assez d’heures pour pouvoir mettre un peu d’argent de côté. J’ai plus beaucoup de sous et il faut que ça rentre.

Mon visa va jusqu’à noël et dans l’idéal j’aimerai faire une 2e année ici, ça dépendra du boulot et des finances. J’ai aussi envie de rentrer  voir mes parents et mes amis pour couper un peu l’année en deux, 5 mois que je suis là déjà!! Mais la vie en France, le Poker ne me manquent pas du tout. L’autre jour j’ai joué au Casino j’ai pris 200$ en 30 minutes, alors que dans mon expérience de serveuse j’étais payée 150$ pour 10 heures de boulot, ça remet les choses en place.

A long terme je veux une vraie vie de famille : un mec, des enfants et des voyages. Continuer à bouger, mais en famille. C’est vraiment devenu mon moteur le voyage, mais pour ça il faut de l’argent et là il faut vraiment que je fasse quelque chose »

Pas vraiment inquiète pour la Miss qui a du ressort et de la volonté. C’est sûr qu’elle rebondira, ici ou ailleurs …

Allez un bonus photos dossiers avec la complicité de la maman d’Anaïs :)